Varanasi, l’ancienne Bénarès, est l’une des villes les plus fascinantes du pays. Aussi étrange et déroutante soit-elle, cette ville sacrée est le nerf central hindouiste où se déroulent de nombreuses cérémonies. Pour un hindou, mourir à Varanasi est le plus beau cadeau de la vie car il libère des cycles de réincarnations. Située au bord du Gange, c’est l’une des villes existantes les plus vieilles et mystérieuses du monde.

Bénarès

Je rejoins cette ville antique en avion depuis Jaipur et dès l’arrivée, Bénarès est à la hauteur du mythe. À l’approche du centre-ville, le tracé des rues disparaît dans la poussière. Il y a des deux-roues partout. Pousse-pousse, rickshaws, charrettes, véhicules paralysent toute la circulation dans un combat de klaxons.

Des motos ou porteurs de brouettes tentent le forcing sous l’œil habitué des autres usagers. Je me rappelle alors de ce que j’avais lu un jour « l’Inde est une vague, il faut se laisser porter et ne pas aller contre si l’on veut la traverser indemne ». Perdue au milieu des ruelles de Bénarès qui forment un immense bazar, je dois suivre les indications sur les murs pour arriver jusqu’à mon auberge.

Hébergement : Wander station : Compter 420 Rp (~5€) par nuit en dortoir.Idéalement située, je n’y ai rencontré que des voyageurs seuls des quatre coins du monde. L’endroit est neuf, propre et chaleureux, on s’y sent comme à la maison.

Je n’ai pas le temps de faire mon check-in que l’hôte me conseille d’aller directement voir sur le toit ce qu’il s’y passe. Je me dépêche donc de grimper les quatre étages et me retrouve effectivement face à un spectacle à 360° qui me laisse sans voix : un coucher de soleil sur la ville et le Gange, des centaines de cerfs-volants qui tourbillonnent, accompagnés de la musique de rues qui raisonne. Quelle ambiance !

Le lendemain matin au petit déjeuner, je rencontre Elado un israëlien de mon âge qui voyage également seul. Nous décidons de partir ensemble à la découverte de cette ville et je suis rassurée d’être en bonne compagnie. Sans itinéraire précis, nous nous perdons dans les ruelles de cet interminable labyrinthe. Nous croisons nos amies les vaches sacrées et nous faisons embarquer à plusieurs reprises par des marchands de Sari ou d’encens avant de débarquer enfin sur les mythiques ghâts du Gange.

Sur le toit voisin, des enfants me passent leur cerf-volant pour voir comment je me débrouille. Ce sont de vrais professionnels et je suis plutôt ridicule par rapport à euxLeur excitation m’amuse. Ce petit jouet « fait maison » semble vivre un réel succès ici !

Les rives du Gange

Sur les rives du Gange, nous longeons les ghâts et leurs immenses escaliers permettant d’accéder au fleuve quelle que soient les variations de son niveau (notamment pendant la mousson). C’est un véritable spectacle qui se déroule ici : on y croise de nombreux pèlerins qui font leur bain sacré tout en faisant leurs ablutions, des gens discutent sur les marches, d’autres jouent aux cartes, font leurs exercices de yoga…

À la tombée de la nuit, c’est sur le ghât le plus central que l’activité se concentre à l’approche d’une cérémonie quotidienne Agni Pooja. Les prêtres récitent alors des prières et chants pour célébrer le Dieu sacré : Shiva. L’endroit est très rapidement enfumé avec la diffusion de nombreux encens. Pas besoin d’être hindou ni croyant pour s’émouvoir de ce spectacle.

À Bénarès, on croise aussi de nombreux sâdhus, ces sages hindous qui ont renoncé à toute attache et se consacrent à la quête spirituelle. On les croise, vivant le plus souvent de mendicité, près des lieux de pèlerinage.

Sur les ghâts se trouvent les fameuses crémations où environ 200 corps sont brûlés chaque jour. Mourir ou être incinéré à Varanasi est la garantie d’être libéré du cycle des réincarnations en chien ou toute autre créature peu appréciée des hindous (Le chien étant la réincarnation d’un voleur chez les hindous, il est assez mal traité ici).

Déroulé d’une incinération…

Les familles apportent le corps recouvert d’un linceul blanc et de fleurs jusqu’au ghât où il est plongé dans le Gange afin d’y être purifié.

Le corps est ensuite placé sur un bûcher et recouvert par d’autres bûches pour protéger le défunt des regards. Il faut à peu près 400 kg de bois pour brûler un corps.

Les crémations à Varanasi sont un véritable business de la mort : négociation des tarifs, approvisionnement en bois, emplacement des bûchers selon la richesse des défunts, tout se monnaye.

À l’aube, les cendres et os restant sont poussés dans le Gange.

De l’autre côté de la rive

Afin d’avoir un autre aperçu de la ville, je décide de sauter à bord d’une petite pirogue locale pour faire la traversée jusqu’à l’autre rive. Les autres passagers sont étonnés de ne pas me voir dans un bateau classique avec mes amis les touristes.

Difficile de décrire l’effet que produit l’impressionnante enfilade de bâtiments variés qui surplombent les ghâts et le fleuve. Temples, hôtels, palais, habitations en ruines ou rénovées… Les façades depuis le Gange offrent un tableau fascinant !

De l’autre côté de la rive, l’ambiance continue d’être à la fois ordinaire et invraisemblable : Des hommes et femmes Dalis, aussi appelés « intouchables » (considérés comme hors castes et affectés à des métiers dit « impurs ») nettoient le linge en frottant sur une planche en bois. Tout cela bien sûr dans cette eau où des cadavres de vaches sont déposés, où des défunts sont baignés, où des égouts sont vidés

De retour à la pirogue, des femmes en tenue traditionnelle viennent me voir avec leurs grands sourires, sans rien me demander, elles s’amusent juste à me toucher la main et à me prendre en photo… Je suis subjuguée par la couleur de leurs robes, je les trouve superbes.

Dernière soirée

Pour ma dernière soirée ici, je décide de me rendre dans une toute petite échoppe qui fait des lassis (boisson traditionnelle à base de lait fermenté). Le chef est seul à confectionner les lassis devant nous : il dispose d’un large choix de parfums de fruits frais, apporte une touche particulière sur la décoration et le tout servi dans un pot en verre. En finissant mon séjour en Inde sur cette note, je ne peux que me dire que cette première expérience en Inde a été un vrai délice !

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